D'Autres «Quatrains Valaisans»


1
Les hannetons ont fini leur ravage.
À ces rameaux déchus octroyés,
ils semblent pleins et innocents et sages
comme s'ils étaient les fils du noyer.

Et l'arbre même ne se plaint qu'à peine,
car dans son vide guérit tant de bleu.
La vie s'attaque à la vie sans haine.
Elle abonde dans les prés heureux

où les grillons s'exaltent cri par cri.
Tout au milieu des jeunes vignes bouge
la tête d'une fille au foulard rouge
comme un point offert à tous ces I.

2
Simple clocher trapu, au geste du semeur
qui jette aux sillons qu'avaient tracés les peines,
sans les compter jamais, les innombrables graines
d'anciennes sonneries, ces carillons du coeur.

La fleur qui les mûrit dans son calice pieux,
le beau fruit qui enfin les versa dans les cloches,
sombres bahuts d'airain, mis dans ce grenier proche
du ciel...: c'était la vie, la vie de tant d'aïeux.

La lente vie de ceux qui, lassés, laissent faire
du fond de leurs tombeaux, ou de ces autres dont
les crânes entassés au flanc des ossuaires
n'osent plus dire: nous dormons......

Les vieux, les petits...,ceux dont le départ précoce
avait brisé un clair et jeune consentement,
eux tous ont fait la fleur et rempli cette crosse
d'où est tombé le trop d'un été abondant.

Le plus fort, le plus doux de leur essence pieuse
tombe autour de nous; taisons-nous, écoutant!
Le rythme du labeur, la joie vendangeuse,
de tous les espoirs la vie volumineuse
est entrée dans ces sons et survit en ces sons!

Peut-être, ce retour nous cherche-t-il à peine,
doucement nous frôlant s'adresse-t-il à Dieu,
à ces maisons, ces champs, à cette terre pleine
de tant de volonté et cachant tant de feu.

Mais, pourtant, dans nos coeurs, de leur côté champêtre,
recevons ce semis, dociles malgré nous,
et portons humblement, pour plaire aux ancêtres,
ce laborieux adieu qui les fit durs et doux.

Aus: Exercises et Évidences